Le rôle du vote urbain dans les élections éthiopiennes de 2005

Actualité africaine
Par Bezunesh Tamru
Français

Résumé

Le 15 mai 2005 des élections générales ont eu lieu en Éthiopie et pour la première fois l’opposition recueille officiellement de bons scores, notamment dans de nombreuses villes. Ceci pose question quant à l’existence d’une spécificité propre au vote urbain ou bien de la réalité d’un vote de rejet mieux exprimé en ville. Dans le présent texte, nous montrons que ces scores positifs et leur répartition sont avant tout un puissant révélateur des différentes échelles territoriales de la contestation. La situation économique demeure un indicateur de choix pour expliquer le marasme dans lequel se trouvent les habitants des petites villes tentés par un vote régionaliste très affirmé, tandis que, dans ces mêmes villes, le vote automatique en faveur du pouvoir en place peut être préféré comme sas de sécurité contre un arrière-pays « ethniquement » différent. La croyance en un monde rural politiquement acquis à la coalition aux commandes du pays est fondée sur les souvenirs de ses années de lutte et aussi sur la subordination du monde rural au pouvoir, habituelle en Éthiopie. Mais dans les campagnes situées dans l’orbite des villes ou traversées par les axes routiers, les paysans ont diversifié leurs stratégies économiques en y intégrant de plus en plus les échanges avec le marché urbain. L’ensemble de ces observations montre l’émergence d’une citoyenneté urbaine individualiste et mondialisée, actuellement plus sensible dans les grandes villes comme la capitale mais ayant de vraies capacités d’entraînement territorial. Ce positionnement urbain en rupture avec le discours dominant du droit des ethnies, au sens de « nations, nationalités et peuples », peut ainsi constituer à terme un projet politique alternatif pour l’ensemble de l’espace éthiopien.

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